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Fin de vie. La 3e loi Leonetti de 2016 abandonne les Français atteints de maladies neurodégénératives !

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Communiqué
18 mai 2022
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L’article 6 de la loi du 22 avril 2005 – la première loi Leonetti – relative aux droits des malades et à la fin de vie, indiquait que « lorsqu’une personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, qu’elle qu’en soit la cause, décide de limiter ou d’arrêter tout traitement, le médecin respecte sa volonté après l’avoir informée des conséquences de son choix. »

Quant à l’article 2 du décret du 29 janvier 2010, il stipule que « lorsqu’une limitation ou un arrêt des traitements a été décidé […], le médecin, même si la souffrance du patient ne peut pas être évaluée du fait de son état cérébral, met en œuvre les traitements, notamment antalgiques et sédatifs, permettant d’accompagner la personne […]. »

Ces deux articles permettaient aux médecins de pratiquer une sédation à toute « personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, qu’elle qu’en soit la cause » et « même si la souffrance du patient ne peut pas être évaluée du fait de son état cérébral. »

On comprend aisément, à l’énonciation de ces textes, qu’une personne atteinte d’une maladie neuro-dégénérative (on pense à Alzheimer, on pense à la SLA, on pense à Parkinson…), affections graves et incurables s’il en est, pouvait bénéficier, dès le stade avancé, de cette aide passive à mourir qui consiste, pour la médecine, à se retirer et laisser le patient mourir par dénutrition et déshydratation, voire par étouffement. La mort intervenant alors généralement à la suite d'une insuffisance rénale aigüe.

Mais la loi du 2 février 2016 – la troisième loi Leonetti – créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie a abrogé ce dispositif pour le remplacer par un article L. 1110-5-2 du code de la santé publique stipulant qu’une « sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès, associée à une analgésie et à l’arrêt des traitements de maintien en vie, est mise en œuvre 1) Lorsque le patient atteint d’une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme présente une souffrance réfractaire aux traitements 2) Lorsque la décision du patient atteint d’une affection grave et incurable d’arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable. »

Les deux termes soulignés indiquent clairement, cette fois-ci, que la sédation ne s’applique pas à un malade d’Alzheimer, sauf en cas d’affection intercurrente (c’est-à-dire qui survient au cours de la phase d’Alzheimer), et ne s’applique aux personnes atteintes de la maladie de Charcot que dans les toutes dernières heures de la vie. Dans les cas de maladie neuro-dégénératives donc, les souffrances physiques réfractaires, les souffrances psychologiques, les dégradations et les situations de déchéance et de dépendance torturent et la loi n’a rien prévu pour aider les patients à s’échapper de cet enfer.

La troisième loi Leonetti est sans doute la plus dogmatique des lois sur la fin de vie, en ce sens qu’elle a fermé toutes les ouvertures (légères) offertes par la loi de 2005 et qu’elle condamne les malades atteints de dégénérescence neurologique à la plus grande des souffrances. De plus, la sédation (une mort cruelle) ne peut s'appliquer que dans les tout derniers jours de la vie (espérance de vie de 4 ou 5 jours), alors que le patient est déjà entré en phase agonique. Une loi d’ultime liberté, telle qu’elle est revendiquée et portée par l’ADMD, devra prendre en considération ces malades, aujourd’hui abandonnés à l’horreur de leur situation.

PhL

 

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