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Nécessité et limites des soins palliatifs : en finir avec les positions dogmatiques...

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Communiqué
30 septembre 2019
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L’accès universel aux soins palliatifs est l’une des trois grandes revendications de l’ADMD avec le droit à l’euthanasie et au suicide assisté. Les responsables de notre association sont les premiers à avoir dénoncé, par exemple, l’absence de reconduction d’un plan national sur les soins palliatifs après la période 2015-2018.

C’est une évidence de sens commun qu’il est nécessaire d’améliorer l’accès aux soins palliatifs et d’amplifier encore leur apport dans les conditions de fin de vie.

Ceci étant, les soins palliatifs ne peuvent remplir dans tous les cas leur objectif de confort et de soulagement des patients. Les soins palliatifs ont des limites que tout le monde, équipes médicales comprises, reconnait. Alors pourquoi refuser aux individus l’accès au droit à l’aide médicale à mourir et laisser souffrir les patients en fin de vie contre leur gré ? C’est ici que l’on se heurte à un mur de pensée dogmatique : les soins palliatifs sont la réponse et quand ils sont en échec, ils sont quand même la réponse !

Pour mieux comprendre un tel déni, il faut aller lire sur internet les comptes-rendus d’audience du Groupe d’études fin de vie de l’Assemblée nationale (http://www2.assemblee-nationale.fr/instances/resume/OMC_PO746925/legislature/15/(block)/cr).Le compte-rendu de l’audition de représentants de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) – société « savante » et association reconnue d’utilité publique – est particulièrement éclairant. La position des deux représentants de cette association s’articule autour d’un constat et d’une préconisation :

primo : « Ceux (en unités de soins palliatifs) qui veulent mourir sont une minorité. »

secundo : « Pour ceux qui veulent vraiment mourir, le suicide reste une option. »

Vous avez bien lu et vous pouvez relire ces propos incroyables ici :

http://www2.assemblee-nationale.fr/15/les-groupes-d-etudes/les-comptes-rendus/comptes-rendus-ge-fin-de-vie/audition-de-representants-de-la-societe-francaise-d-accompagnement-et-de-soins-palliatifs

Tout fanatisme (politique ou religieux) est un anti-humanisme, on le savait ; en voilà une énième confirmation. Et merci pour les minorités dont ces messieurs-dames ne voient pas l’utilité de s’occuper…

On comprend en définitive où réside le point dogmatique, ce moment de la pensée qui ne peut faire l’objet d’aucune argumentation rationnelle : une minorité (donc des gens soupçonnables quant à la normalité et à leur moralité puisque minoritaires) sont en fait habités de la volonté de mourir et ces femmes et ces hommes, par-là indignes, n’ont qu’à se débrouiller par eux-mêmes. Bref le cœur religieux d’un jugement sur le mal et l’acceptation millénaire de la souffrance au nom d’une « vie sacrée ».

C’est dans ce contexte que l’on appréciera l’article d’Emmanuel Hirsch, professeur d’éthique médicale et que l’on ne peut soupçonner de sympathie envers l’ADMD. Article paru dans le media en ligne The Conversation (https://theconversation.com/la-loi-sur-les-soins-palliatifs-fete-ses-20-ans-un-texte-fondateur-mais-un-bilan-insuffisant-118517). Revenant sur les 20 ans de soins palliatifs en France, M. Hirsch se sent obligé de citer le président de l’ADMD de 1979 pour lui donner raison face à la SFAP quant à ces « positions culturelles et politiques ».

On conclura en citant ce professeur d’éthique médicale :

« Avec l’accès à la sédation profonde et continue jusqu’au décès institué dans la loi du 2 février 2016 (...) qui peut être assimilée à une ‘‘euthanasie lente’’, les derniers interdits semblent avoir été partiellement levés. De telle sorte que semble s’imposer désormais une loi dépénalisant en France le suicide médicalement assisté ou l’euthanasie, ce qu’il convient de dénommer par euphémisme ‘‘l’assistance médicalisée active à mourir’’. »

Foin des interdits et avec un peu de bon sens et de courage politique, légalisons ce qu’une énorme majorité souhaite : mettre le patient au centre des décisions qui concernent sa fin de vie, en ouvrant le champ des possibles pour un droit à l’euthanasie et au suicide assisté.

Luc Bonet

Délégué de l’ADMD pour la Vienne

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