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Ma vie en vieille et le droit d'en choisir la fin - Régine Dhoquois-Cohen, Jacqueline Feldman

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Communiqué
24 mai 2022
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« La vie c’est comme une dent... », chantait très justement Boris Vian. On n’y pensait pas jusqu’à ce qu’elle se gâte. Alors, après tous les traitements existants, si l’on finit par devoir l’arracher, aujourd’hui la médecine nous offre une anesthésie rapide et efficace. Pourquoi ne pouvons-nous pas bénéficier d’une même attention, d’une même compréhension face à la douleur, lorsque c’est notre mort qu’il faut envisager ? Ou plutôt notre fin de vie, puisque la mort n’est que le prolongement de celle-ci, ponctuée – si l’on a de la chance, ou pas ? – par la vieillesse.

C’est ce cheminement, cette prise de conscience, cette lucidité que Régine Dhoquois-Cohen et Jacqueline Feldman nous détaillent en compilant leurs textes et ceux d’autres auteurs d’époques différentes. Politiquement engagées dans les luttes féministes des années 70, les deux auteures ne font qu’une pour le lecteur très finement happé dès le début de l’ouvrage par l’humour des premiers textes.

La vieillesse est si bien décrite que tout lecteur de 60 ans reconnaît parfaitement les symptômes inexorables qui font de lui un vieux ou une vieille : à ses yeux, mais surtout ceux des autres. Les six premiers chapitres évoquent le temps des aidants, leur implication plus ou moins autoritaire dans la vie des aidés, les maladies et les angoisses qui en découlent. Les chapitres suivants, ouvrent les portes des résidences médicalisées, juste avant l’Ehpad, baptisé Epade dans le livre, pour mieux en sourire.

Il ne s’agit pas de démoraliser le lecteur, bien au contraire. Suivant les expériences de vie relatées, on se surprend à se trouver bien plus chanceux que Jacqueline ou Régine. Ou bien, suivant la situation décrite, on s’interroge sur soi-même : « Quelle sera ma façon de réagir ?».

Le dernier tiers du livre est, lui, plus grave, plus directement tourné vers « la mort aidée », son acceptation par différents pays, sa représentation au cinéma, les différentes évolutions juridiques et l’hypocrisie des « soins palliatifs ». Cette solution qui, sous couvert de modernité attentive à la souffrance, étouffe sous le joug des tabous sociétaux et le manque cruel de moyens : sauf en matière de fournitures ad hoc des laboratoires pharmaceutiques !

La tribune, publiée en 2019 dans Libération et signée par 200 femmes (dont pour l’instant l’espérance de vie est encore plus longue), affirme avec force la volonté de choisir son euthanasie, sa mort douce en Grec.

La vieillesse et la mort sont un tout, tentons d’en faire une dernière aventure de vie, la plus digne possible. Tentons... Car au moment final, comme en filigrane, la question se pose dans ce livre : aurons-nous la volonté, la conscience, le temps, la possibilité ? Peut-être, à la condition d’être aidés par une loi et ses mesures clairement débattues, entendues et acceptées par la société.

A.C-M

Publié en avril 2022 - 18€99
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