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Euthanasie : la technique bien rodée de la droite pour bloquer les débats - Huffpost

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Communiqué
5 avril 2021
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POLITIQUE - Elle avait toutes les chances d’être adoptée, mais ne sera peut-être même pas débattue. La proposition de loi controversée créant un droit à l’euthanasie pour les personnes souffrant d’une pathologie incurable, inscrite jeudi 8 avril à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, fait l’objet d’environ 3000 amendements.

Un nombre qui devrait rendre -mécaniquement- impossible l’examen du texte instituant un “droit à une fin de vie libre et choisie” du député Olivier Falorni (groupe Libertés et Territoires), prévu dans le cadre de la niche parlementaire attribuée à ce groupe. 

“Un quarteron de députés prétend par l’obstruction parlementaire empêcher l’Assemblée de débattre sur un sujet de société majeure”, s’est indigné l’élu dès vendredi auprès de l’AFP, alors que son texte avait été adopté deux jours plus tôt, mercredi soir, en commission.

“C’est la démocratie parlementaire qui est mise en cause”, a-t-il fustigé, visant “une poignée de députés LR” qui ont multiplié les amendements “copié-collé”, avant d’ajouter: “cela va scandaliser des millions de Français qui espèrent que cette loi soit enfin votée”. En commission des Affaires sociales, la proposition de loi n’avait fait l’objet que de 262 amendements. 

Le texte du député de Charente-Maritime veut apporter une nouvelle réponse au douloureux et sensible débat sur la fin de vie et l’euthanasie, cinq ans après la loi Claeys-Leonetti, qui autorise la sédation profonde et continue.

En commission Olivier Falorni, un ancien socialiste, a reconnu que son texte abordait des “questions existentielles”. Ouvrir un droit à “l’ultime liberté” de décider d’une mort médicalement assistée permettrait de répondre à une “hypocrisie”: laisser les personnes partir en “exil” en Belgique ou en Suisse pour y avoir recours, et fermer les yeux sur les “2000 à 4000” euthanasies clandestines pratiquées chaque année en France “parfois à l’insu des proches” des malades, selon lui.

Le sujet divise tous les groupes parlementaires et suscite l’embarras du gouvernement mais plusieurs figures de la majorité ont apporté leur soutien à la proposition de l’élu de Charente-Maritime, dont la présidente de la commission des Lois Yaël Braun-Pivet.

Dans une tribune au Journal du Dimanche, 270 députés de tous bords s’insurgent: “Nous voulons débattre. Nous voulons voter. Le temps du Parlement est venu. Respectons-le”, plaident ces parlementaires favorables à la proposition de loi, emmenés par Jean-Louis Touraine, Yaël Braun-Pivet, Marine Brenier (LR) et quatre présidents de groupes politiques, Jean-Luc Mélenchon (LFI), Valérie Rabault (PS), Olivier Becht (Agir) et Bertrand Pancher (Libertés et territoires).

 

“Cette question traverse notre société depuis quarante ans. Plusieurs textes ont été déposés à l’Assemblée comme au Sénat depuis 2017. Nos concitoyens nous interpellent, attendent que nous en débattions et, pour une majorité d’entre eux, que nous l’adoptions”, ajoutent ces députés, dont quelque 150 LREM.

Une technique déjà éprouvée en février

Certains opposants estiment qu’un tel sujet ne peut être débattu dans le temps réduit d’une niche parlementaire quand d’autres sont radicalement hostiles à la mesure pour des principes philosophiques et religieux. L’adjoint à la mairie de Paris Jean-Luc Romero a d’ailleurs pointé du doigt, sur les réseaux sociaux, les “quatre députés” artisans de ce “déni de démocratie.” Les élus Les Républicains Patrick Hetzel, Xavier Breton, Julien Ravier et Frédéric Reiss ont effectivement, à eux quatre, déposé environ 1500 amendements.

Même agacement du côté du député Matthieu Orphelin, lequel dénonce, dans un communiqué, une “obstruction honteuse” menée par “cinq députés”, ajoutant l’élu des Côtes-d’Armor Marc Le Fur à la liste.

Une technique d’obstruction déjà éprouvée par la droite au moment du vote sur l’allongement du délai légal de l’IVG en février dernier. À l’époque, le groupe socialiste, qui voulait profiter de sa niche parlementaire pour remettre à l’ordre du jour cette proposition visant à allonger le délai de 12 à 14 semaines de grossesse (16 semaines d’aménorrhée), avait finalement renoncé face aux quelques 500 amendements alors déposés. 

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