« Comment souhaiter une bonne année à quelqu’un qui meurt au milieu ? »
De la baie de Bohai, dans le nord de la Chine, aux rives de la Seine, à Saint-Germain-des-Prés, l’auteure nous conte les 76 années de sa vie, passionnante, turbulente, parfois heureuse, parfois malheureuse, mais toujours assumée ; une épopée contemporaine qui conduit la petite fille d’immigré russe né en 1914 à Saint-Petersbourg, chassé par la révolution bolchévique puis naturalisé français, de la banlieue de Pékin à l’Indochine encore française, puis à Grasse, à Paris, à Londres, à la Seine-Saint-Denis, à Hambourg, au Venezuela, en Suisse, pour terminer sa vie presque à l’ombre de l’église Saint-Germain-des-Prés, dans ce Paris merveilleux des vieux hôtels particuliers, dans l’ancien appartement d’un peintre, rue du Bac. Cette vie, c’est la chronique de la seconde moitié du 20e siècle, tant l’auteure a pleinement embrassé son temps et a été attentive aux soubresauts de ce siècle.
Mais à côté des anecdotes, des réflexions personnelles énoncées à voix haute, des critiques de son temps, des déclarations d’amour (son mari, l’Allemand aux antipodes de ses manières et de ses goûts, mais le père de ses enfants ; Marco, son prof de sport, mais pas uniquement, l’amour de son automne puis le soleil de son hiver) et des jugements parfois mordants mais jamais véritablement méchants, l’auteure nous livre sa réflexion éclairée (elle est l’une des responsables de l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité – ADMD) sur l’aide active à mourir, possible en Suisse, mais aussi aux Pays-Bas, en Belgique, au Luxembourg et ailleurs (Canada, Australie, Colombie, USA…), et toujours interdite en France où l’on meurt toujours mal car la loi de 2016 (« dormir avant de mourir ») endort les personnes en toute fin de vie et les laisse mourir de faim et de soif, ce qui se révèle absolument cruel.
Et en effet, après une vie qui fut si riche, si maitrisée, si chanceuse malgré les déconvenues et les violences du début, l’auteure a pris la décision de vivre sa toute dernière année. Dès le premier chapitre du livre, elle écrit : « 76 ans ? OK, mais pas 77. » Juillet 2020 ? Août 2020 ? Novembre 2020 ? Nous verrons bien. Le droit de mourir dans la dignité est un droit personnel, et nul ne doit se sentir contraint…
Terminer en beauté est le livre d’une femme libre, qui écrit comme elle se comporte au quotidien, c’est-à-dire avec chaleur, simplicité, intelligence et élégance.
PhL
Editions Favre