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Euthanasie : «Une évolution de la loi est possible» - Le Parisien

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Communiqué
13 juillet 2018
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Le Conseil d’Etat dit non à l’euthanasie. Dans un rapport sur la bioéthique, rendu public, les Sages prônent le statu quo sur la fin de vie, estimant que la loi Claeys-Leonetti de 2016 permet « de répondre à l’essentiel des demandes sociales d’une aide médicale à mourir ».

Un positionnement qui rejoint celui porté par la ministre de la Santé Agnès Buzyn, qui depuis plusieurs mois répète son opposition à une évolution de la loi. Pourtant, le débat au sein des parlementaires n’est pas si tranché. En février dernier plus de 150 députés signaient une tribune pour réclamer une loi en faveur de l’aide active à mourir pour 2018. Le 10 juillet c’était au tour du président du groupe La République en Marche à l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, d’annoncer en une petite phrase qu’un nouveau texte sur le sujet pourrait bientôt être discuté à l’Assemblée.

Jean-Luc Romero, président de l’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) mène un combat depuis plusieurs années pour une évolution de la législation sur la fin de vie. Pour Le Parisien, il réagit au rapport du Conseil d’Etat et aux déclarations des parlementaires.

Les Sages rapportent que même dans les pays qui ont fait le choix de la légalisation de l’euthanasie il subsiste des pratiques clandestines. Qu’en pensez-vous ?

JEAN-LUC ROMERO. Aujourd’hui parmi tous les pays qui ont légalisé l’euthanasie aucun ne veut revenir en arrière. Les lois sont là pour réguler les choses, mais en France on est dans la même situation que lors de l’interdiction de l’avortement : les gens qui ont de l’argent partent mourir à l’étranger et les autres se débrouillent. On constate notamment pour ceux-là des suicides violents.

La loi prévoit des soins palliatifs et notamment la sédation profonde et continue pour les personnes mourantes, n’est-ce pas suffisant ?

Nous, on se bat pour que la loi donne un accès universel aux soins palliatifs et au droit à l’euthanasie, mais la sédation terminale est une euthanasie déguisée. Elle consiste à vous endormir et arrêter de vous nourrir et vous hydrater.

Mais on vous endort et on ne sait pas à quelle heure, ou quand la personne va mourir. On dit qu’il n’y a pas de souffrance mais on constate sur les personnes soumises à la sédation de nombreux effets secondaires comme des escarres, des infections. Les jours et les mois qui suivent ne sont que des souffrances.

Le Conseil d’Etat considère que l’euthanasie pourrait contredire les missions de la médecine…

La médecine évolue, le serment d’Hippocrate n’est par exemple plus appliqué à la lettre aujourd’hui. Aussi, on peut avoir le droit d’éteindre la lumière. Il faut que certains comprennent que l’on n’est pas éternel.

On entend même parfois que l’euthanasie consiste à tuer. Mais accompagner la personne, ce n’est pas un choix entre la vie et la mort, c’est un choix entre deux morts. Les personnes concernées sont en fin de vie.

La tribune des parlementaires LREM et la déclaration de Richard Ferrand sont-ils des signes que les lignes sont en train de bouger à l’Assemblée ?

On n’est pas loin d’une majorité de l’Assemblée nationale qui veut une légalisation de l’euthanasie. La ministre de la Santé a enterré une nouvelle loi sur la fin de vie mais ce n’est pas nouveau, elle s’y est toujours opposée. Face à cela les mots de Richard Ferrand ne sont pas innocents. On est autour de plus de 200 députés LREM qui sont pour une loi sur l’euthanasie. On compte seulement une dizaine de députés dont on sait de façon sûre qu’ils y sont opposés.

Il se passe quelque chose d’exceptionnel. Personne n’avait demandé à Richard Ferrand de faire cette déclaration, cette fois ça veut dire quelque chose, il évoque la procréation médicalement assistée et la fin de vie. Je pense qu’il prend conscience de ce qu’il se passe au sein de ses troupes.

Et cette évolution du parlement est très nouvelle. Désormais je rencontre des parlementaires de tous les partis alors qu’avant je voyais surtout des députés de gauche. Je me dis qu’aujourd’hui une évolution de la loi est possible.

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